Modélisation et Durabilité des Matières Premières : Un Débat Renouvelé

L’analyse des tendances de croissance démographique et de prospérité expose un risque matériel et environnemental sans précédent pour les décennies à venir. Les chiffres et projections soulignent l’insoutenabilité du modèle actuel et la nécessité d’une révision radicale des stratégies d’approvisionnement.

Dans les années 1970, des travaux comme ceux de Meadows et al. (1972) suggéraient un épuisement imminent des combustibles fossiles et des matières premières. Cependant, les données actuelles contredisent cette prédiction à court terme.

Les informations publiées par les grands pays producteurs et par l’USGS (United States Geological Survey) montrent que, malgré l’augmentation de la production mondiale, la « durée de vie » des métaux de base (temps d’utilisation aux niveaux actuels) est restée stable au cours des cinquante dernières années.

Concernant les réserves de métaux spécifiques, les réserves de cuivre, de fer, de nickel et de lithium n’ont pas diminué au cours des décennies de 1996 à 2010), et que la durée de vie de nombreux métaux se maintient à 50 ou 100 ans. Les technologies et les sources futures sont intrinsèquement liés, transformant la question d’une simple projection de durée en une interrogation sur la capacité à extraire raisonnablement les ressources nécessaires sur un horizon de 50 à 100 ans.

Pour une analyse pertinente, il est crucial de bien définir les termes :

Gisement : Concentration de minerai dont la nature et la géométrie permettent d’envisager une exploitation. Une notion d’ordre géologique, théoriquement indépendante du temps.

Ressource : Évaluation de tout le minerai présent in situ.

Réserve : Une réserve est liée à un plan d’extraction et est généralement envisagée à court terme. Elle correspond à la partie du gisement exploitable sous des conditions économiques propres au gisement (coût d’exploitation versus prix de vente).

Réserves Base : Partie des ressources non incluses dans les réserves au temps présent. Elles correspondent aux réserves de l’USGS utilisées pour le plan initial d’une exploitation minière.

Un projet minier a pour tâche de renouveler ses réserves en convertissant continuellement les ressources non incluses en réserves.

Une réserve peut diminuer, non seulement par épuisement, mais aussi par une diminution du prix du marché qui rend l’exploitation moins rentable. Inversement, des ressources sous-économiques (faisant partie des réserves base) peuvent devenir réserves si l’amélioration de l’infrastructure ou une variation de prix les rend rentables.

L’optimisme concernant la disponibilité des ressources repose largement sur les avancées technologiques.

L’histoire du cuivre est éloquente :

Le prix du métal, malgré l’exploitation de minerais moins concentrés, est resté relativement stable sur le long terme.

L’innovation technologique permet de :

Tant que l’industrie peut exploiter les gisements connus de manière rentable, l’exploration de nouvelles zones n’est pas une priorité économique immédiate.

Bien que l’optimisme technologique soit fort, il s’oppose à des études pessimistes qui soulignent la finitude des ressources minérales et l’impossibilité de poursuivre une croissance exponentielle de la production.

Il est certain que l’intégralité des ressources et les réserves futures ne sont pas encore entièrement connues. De nouvelles ressources seront découvertes et exploitées, notamment celles qui sont actuellement difficiles d’accès, grâce aux progrès des technologies d’exploration et d’exploitation.

Cependant, même si l’on pouvait maintenir une croissance annuelle de la production de cuivre de 3 % (un taux historique), la totalité du cuivre contenu dans la croûte terrestre (sur 30 km d’épaisseur) serait épuisée en l’espace d’une centaine d’années.

En conclusion, si la technologie repousse constamment les limites des réserves, transformant les ressources de base en réserves exploitables, la question de la durabilité à très long terme demeure un défi nécessitant une modélisation dynamique des flux physiques et monétaires.

L’enjeu n’est plus de déterminer la durée de la croissance exponentielle, mais plutôt d’évaluer notre capacité à extraire, de manière économiquement viable, les minéraux requis pour répondre aux besoins projetés sur les 50 à 100 prochaines années. Au-delà de ce centenaire, l’incertitude concernant les futurs besoins, les technologies et les gisements potentiels rend toute projection peu significative.