06 mars 2024 Informations

La construction navale vers une révolution écologique ?

Un impact écologique non négligeable

Selon l’ADEME, 20 000 unités de plaisance arrivent chaque année en fin de vie et seulement 3 000 (source APER) sont officiellement détruites. Par conséquent, 17 000 bateaux sont « abandonnés », coulés, partiellement détruits ou pourrissent lentement quelque part dans un jardin, une réserve, un chantier, au bord de l’eau, etc.

Il est ainsi très préoccupant de constater le nombre élevé de bateaux de plaisance qui arrivent en fin de vie chaque année sans être correctement traités. L’abandon ou la destruction non réglementée de ces embarcations contribuent, non seulement à la pollution des océans par les déchets plastiques, mais également à d’autres problèmes environnementaux tels que la détérioration des écosystèmes marins et la contamination chimique.

Il est essentiel de promouvoir des pratiques de gestion appropriées pour les bateaux en fin de vie, notamment en encourageant le recyclage, la réutilisation des matériaux, ou la déconstruction contrôlée dans des installations agréées. Les gouvernements, les organismes de réglementation et les acteurs de l’industrie maritime doivent travailler ensemble pour mettre en place des politiques et des infrastructures qui favorisent un traitement responsable des bateaux en fin de vie, afin de limiter leur impact environnemental néfaste.

ll est important de reconnaître que l’évolution de l’industrie nautique s’est déroulée dans un contexte spécifique, marqué par une croissance économique soutenue et une disponibilité abondante de ressources telles que le pétrole et ses dérivés. Cette période, souvent qualifiée de « Trente Glorieuses », a vu l’émergence d’une industrie nautique industrialisée, caractérisée par des processus de fabrication généralisés et techniquement fiables.

Cette industrialisation a permis la production à grande échelle de divers types d’embarcations, des bateaux de pêche aux voiliers en passant par les planches à voile, répondant ainsi à une demande croissante de la part des plaisanciers et des professionnels de la mer.

Il est crucial de noter qu’il n’est pas dans notre intention de culpabiliser les plaisanciers ou les acteurs de l’industrie. Cette évolution reflétait les conditions économiques et technologiques de l’époque, ainsi que les besoins et les préférences des consommateurs.

Cependant, il est important de reconnaître que cette période de prospérité économique a eu des conséquences environnementales, notamment en ce qui concerne la consommation de ressources non renouvelables telles que le pétrole, les métaux, etc… avec des conséquences non négligeables sur les émissions de gaz à effet de serre.

L’aluminium et l’acier ont par exemple chacun leurs avantages et leurs inconvénients. Bien que l’aluminium soit recyclable à 100% (mais en réalité il faut toujours ajouter de l’aluminium vierge dans la re-construction), sa production est énergivore et émet des quantités importantes de CO2, 22 tonnes pour une tonne d’aluminium produit. L’acier, quant à lui, a une empreinte carbone plus faible à la production, 2,3 tonnes de CO2 pour une tonne d’acier, et un taux de recyclage respectable, de 40% à 70%. Le choix entre les deux dépendra donc des compromis que les chantiers sont prêts à faire en termes de performance, de coût et d’impact environnemental.

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Source : Freepik

Un changement de modèle nécessaire et des matériaux alternatifs

Aujourd’hui, alors que nous sommes de plus en plus conscients des défis environnementaux auxquels nous sommes confrontés, il est essentiel pour l’industrie nautique de rechercher des moyens de produire et d’utiliser des embarcations de manière plus durable, tout en continuant à répondre aux besoins et aux aspirations des plaisanciers et des professionnels de la mer.

Nous devons changer de modèle. Cela peut impliquer l’adoption de technologies plus respectueuses de l’environnement, la promotion de pratiques de navigation responsables et la sensibilisation à l’importance de la préservation des écosystèmes marins.

Il est encourageant de voir que les architectes navals et les chantiers maritimes cherchent des solutions techniques pour rendre les bateaux plus écologiques et durables. Le recours à des matériaux alternatifs, tels que le lin, est une démarche prometteuse dans cette direction. Le lin est une vraie réponse pour la production des peaux, ou des bordés si vous préférez.

Le lin présente, en effet, plusieurs avantages environnementaux. Sa culture permet de retenir une quantité significative de carbone, ce qui contribue à réduire l’empreinte carbone globale. De plus, le remplacement de la fibre de verre par du lin dans la construction des bateaux offre une alternative plus durable et plus respectueuse de l’environnement.

Il est vrai que le lin ne peut pas répondre à toutes les exigences techniques par lui-même, mais en combinaison avec d’autres matériaux tels que les mousses PET ou le liège, il peut offrir des performances adéquates tout en réduisant l’impact environnemental global.

Concernant les coûts, il est encourageant de constater que l’utilisation de ces matériaux alternatifs ne représente qu’un faible pourcentage supplémentaire par rapport aux méthodes de construction traditionnelles. Cela signifie que les chantiers maritimes peuvent s’engager dans cette transition vers des pratiques de construction plus durables sans compromettre leur rentabilité financière.

En fin de compte, l’adoption de matériaux comme le lin dans la construction navale représente une avancée importante vers la réduction de l’empreinte environnementale de l’industrie nautique, tout en ouvrant la voie à une innovation continue dans le domaine de la durabilité.

Un autre défi majeur réside dans le choix des résines utilisées dans la construction navale. Les résines époxy biosourcées offrent une alternative plus respectueuse de l’environnement par rapport aux résines traditionnelles telles que le polyester. Bien que les résines époxy présentent une durée de vie plus longue, un siècle au lieu de 30 à 50 ans pour le polyester, il est essentiel de prendre en compte leur empreinte carbone plus élevée lors de leur production, 17 tonnes de CO2 pour une tonne d’époxy contre 5,8 tonnes de CO2 pour le polyester. Cependant, avec une résine époxy biosourcée, les émissions baissent à 10 tonnes de CO2.

Collaboration et engagement : la transition à portée de tous

Il est intéressant de noter que ce sont souvent les petits chantiers maritimes qui sont à l’avant-garde de l’innovation environnementale. Leur agilité et leur engagement leur permettent d’expérimenter de nouvelles techniques et de jouer un rôle moteur dans la transition vers des pratiques de construction plus durables.

Cependant, il est également important de reconnaître que les grands chantiers industriels peuvent nécessiter plus de temps pour s’adapter aux changements en raison de leur taille et de leur complexité. Cela dit, avec une prise de conscience croissante de l’importance de la durabilité environnementale, nous pouvons espérer que l’ensemble de l’industrie nautique s’engage dans cette transition vers des modèles de construction plus respectueux de l’environnement.

En fin de compte, la révolution vers une construction navale plus durable nécessite une collaboration et un engagement de tous les acteurs de l’industrie, grands et petits, pour créer un avenir maritime plus écologique et viable pour tous.

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